AFP - La
scolarisation des enfants à deux ans, souvent présentée comme
une bonne solution, notamment pour pallier le manque de places en
crèche, est "une fausse bonne idée" pour des
pédopsychiatres qui estiment qu'elle favorise retard dans les
apprentissages et développement de la violence.
Réunis mercredi
autour d'une conférence-débat, organisée par l'Association
française de psychiatrie, les pédopsychiatres ont utilisé les
termes de "crime", "contre-sens éducatif",
"vraie mauvaise idée", "maltraitance",
évoquant une "évidence" mal entendue par le pouvoir
politique.
"Il faut une
loi qui dise que l'école est +accessible à trois ans révolus+,
comme on ne vote pas à 18 ans moins une semaine", a estimé
Claire Brisset, défenseure des enfants, critiquant la loi
d'orientation sur l'École de 1989 qui prévoyait la possibilité
de scolarisation précoce.
En effet, pour
Geneviève Haag, pédopsychiatre, "la troisième année de la
vie est l'achèvement d'un cycle de développement qui va de la
naissance à l'acquisition du "je", c'est-à-dire à
celle d'une autonomie dans le sentiment de séparation corporelle
et identitaire".
Elle explique
ainsi que l'enfant vit alors une phase complexe de sa construction
et, entre autres, perfectionne son langage, développe les jeux et
dessins spontanés, ainsi que son imagination et acquiert la
maîtrise de son agressivité.
La stabilisation
de cette étape, "vers 2 ans et 9-10 mois" selon elle,
est indispensable à l'épanouissement dans un groupe important,
telle qu'une classe d'école maternelle, assure-t-elle.
Scolariser un
enfant trop tôt reviendrait donc à le brusquer et provoque des
réactions diverses telles que l'inhibition, le sentiment de
solitude, les conduites agressives... Et, au delà, peut avoir des
conséquences durables bien plus graves.
Linguiste, Alain
Bentolila estime que, scolarisés trop tôt, "les enfants
apprennent le langage entre enfants et disposent à l'entrée en
CP de 300-350 mots de vocabulaire et non 900-1.000 comme les
autres". "Il n'est pas question alors d'entrer dans
l'apprentissage de la lecture", relève-t-il.
Tout en se
rangeant à cette opinion, Roger Mises, professeur émérite de
pédopsychiatrie, ajoute que certains enfants, trop jeunes pour la
maternelle, s'adaptent à la situation par un processus
psychologique de régression et, du coup, ne donnent pas les
signes avant-coureurs d'éventuels troubles du comportement à
venir.
Quoi qu'il en
soit, tous les enfants concernés "ne franchissent pas les
étapes décisives de leur histoire". Cela se traduit à
l'adolescence par un développement plus important de
"l'agir" (violence, dépression, addiction, tentative de
suicide...), insiste M. Mises, d'autant plus qu'ils viennent d'un
milieu défavorisé, précise-t-il.
Face à ce
constat, tous les intervenants se sont accordés pour promouvoir
des structures spécifiques à l'accueil des 2-3 ans laissés aux
soins de spécialistes de la petite enfance et non d'instituteurs
"pas formés pour cela car les IUFM ont depuis longtemps
laissé tomber la maternelle", selon le psychiatre Bernard
Golce.
AFP
- Des psychiatres critiquent la scolarisation à deux ans
La
scolarisation des enfants à deux ans, inscrite dans la loi
d'orientation sur l'École de 1989, a été vivement critiquée
mercredi par des pédopsychiatres car elle favoriserait troubles
comportementaux et retards dans l'apprentissage de la lecture et
de l'écriture.
Lors
d'une conférence-débat sur le thème "scolarisation à deux
ans, une fausse bonne idée", organisée par l'Association
française de psychiatrie (AFP), différents spécialistes ont
insisté sur les conséquences néfastes d'une scolarisation trop
précoce.
Présente
à ce débat, la défenseure des enfants Claire Brisset s'est
prononcée pour une loi instaurant la scolarisation à trois ans révolus.
"La
troisième année est l'achèvement d'un cycle de développement
qui va de la naissance à l'acquisition du +je+, c'est-à-dire à
celle d'une autonomie dans le sentiment de séparation corporelle
et identitaire", a expliqué Geneviève Haag, pédopsychiatre.
Il ne faut donc pas selon elle plonger l'enfant dans un groupe de
20 à 30 élèves avant qu'il n'ait achevé cette étape de son développement.
Elle
a évoqué des risques d'"inhibition, de solitude et de
conduites agressives", qui peuvent aller jusqu'à "accroître
dans la société les chances de violence".
Pour
Robert Mises, professeur émérite de pédopsychiatrie à
l'université Paris-Sud, même si l'enfant ne montre pas toujours
des signes extérieurs de troubles (hyperactivité, retard dans
les apprentissages...), "des phases décisives de son
histoire ne sont pas franchies et il va se trouver gravement menacé
par les remaniements inéluctables qu'introduit
l'adolescence".
"Les
enfants scolarisés trop tôt ont un handicap linguistique à leur
entrée en CP: ils disposent de 300-350 mots au lieu de 900-1.000,
il n'est donc pas question pour eux d'entrer dans l'apprentissage
de la lecture", a par ailleurs affirmé le linguiste Alain
Bentolila.