La
FSU se réjouit de l’émergence d’un véritable
mouvement citoyen qui a permis que la question de l’Europe
entre de façon passionnée dans le débat public.
Le
syndicalisme, en particulier celui que porte la FSU, y a
toute sa place : en effet les questions économiques et
sociales, les services publics, l’éducation, la
recherche, l’emploi, les droits qui sont au cœur du
projet concernent directement le mouvement syndical, ne
serait-ce que parce que nombre de revendications en dépendent
et que celles-ci sont des éléments de la construction
d’une société plus juste, plus solidaire, plus humaine.
Dans nombre de nos métiers, nous vivons au quotidien
l’expérience d’échanges et de partenariats
scientifiques et culturels européens et plus largement
internationaux. En outre des réseaux d’échanges actifs
se sont construits. Le repli hexagonal n’est pas notre
horizon.
Le
CDFN confirme l’analyse et le jugement que la FSU a déjà
exprimés à partir de ses revendications, de ses
propositions et de ses luttes.
En
effet alors que nous combattons des politiques marquées par
le « tout marché », et la concurrence érigée
en dogme avec leur cortège de droits rognés, de services
publics menacés, d’emplois supprimés... le projet de
traité, loin de permettre de changer ces politiques, les
fige en donnant valeur constitutionnelle aux principes qui
les guident et les produisent.
La
Charte des droits fondamentaux, bien qu’elle affirme des
principes auxquels nous souscrivons, n’énonce que des
principes généraux peu contraignants et des droits au
rabais : elle n’est pas de nature à servir de point
d’appui pour développer partout en Europe des droits et
faire converger vers le haut les situations. En revanche la
concurrence entre États, le dumping social et fiscal généralisé,
le primat donné aux règles du marché peuvent aboutir à
une remise en cause des droits plus favorables là où ils
existent. L’inscription dans le préambule d’un "héritage
culturel et religieux" de l’Europe ainsi que le rôle
et la place reconnus aux Églises constituent une nouveauté
qui menace la laïcité. La notion de Service d’Intérêt
Économique Général, dont les principes ne sont même pas
définis et qui ne peuvent échapper aux règles de la
concurrence que de façon exceptionnelle et limitée, ne
permet pas de défendre des services publics, et encore
moins des fonctions publiques, répondant aux besoins
d’une société plus juste et plus solidaire.
Rien
ne garantit l’effectivité d’un droit à l’éducation
ambitieux échappant aux règles du marché et à une
conception étroitement utilitariste. Rien ne garantit le développement
d’une recherche répondant aux besoins sociaux et échappant
au libéralisme. La connaissance est un bien de l’humanité,
qui se construit sur la coopération et sur l’assimilation
critique de l’information et des savoirs. Ceux-ci doivent
donc pouvoir circuler sans frontière. L’Europe doit se définir
comme un espace de développement scientifique,
technologique, culturel ambitieux. Cette ambition est
incompatible avec l’appropriation marchande des savoirs,
la mise en concurrence généralisée des hommes, des équipes,
des établissements.
Ce
projet, qui dénie aux citoyens la possibilité de débattre
et choisir démocratiquement leurs politiques économiques
et sociales, va à l’encontre de ce qui est nécessaire
pour construire une Europe de la coopération, de la paix,
du développement durable et partagé, de l’éducation et
des droits sociaux.
C’est
pourquoi la FSU, consciente que chacun fera son choix de
citoyen en toute responsabilité, renouvelle sa condamnation
du projet et le rejette. Elle appelle les personnels à
prendre part massivement au vote le 29 mai. Alors que la
plupart des grands médias, déséquilibrant honteusement
l’expression des points de vue, ont révélé la piètre
idée qu’ils ont de la démocratie, ce qui doit préoccuper
toutes les forces attachées à la place du débat démocratique
dans le processus de transformation sociale, la FSU appelle
ses SN et SD à faire connaître et partager largement sa
position et ses arguments.
Alors
que nombre de partisans du projet de traité prédisent les
pires conséquences en cas de rejet de celui-ci en France ;
la FSU au contraire considère que son adoption, fermant
pour longtemps la porte à toute renégociation de son
contenu, ne pourrait que rendre plus difficiles ses luttes.
Inversement elle sait qu’en Europe nombreux sont ceux qui,
dans les syndicats et les mouvements sociaux, partagent nos
aspirations à une autre Europe et qu’un nouvel élan
serait favorisé par la victoire du « non ».
Le
rejet du TCE ne peut que contribuer à cet élan et rouvrir
une nouvelle étape de construction européenne sur de
nouvelles bases. Le CDFN de la FSU entend s’inscrire dans
cette dynamique.
Après
le 29 mai, le mouvement syndical est confronté au défi
d’être en mesure de contrer par des mobilisations concrètes
les directives libérales en cours, d’être capable de
peser sur les orientations européennes en imposant plus de
démocratie face au fonctionnement technocratique des
institutions européennes, de proposer des alternatives pour
la justice sociale et l’emploi, pour des mécanismes de
solidarité entre les pays membres de l’UE, et avec les
pays du Sud. La FSU est résolue à continuer d’agir et de
rassembler pour construire des alternatives. Elle entend
donner une nouvelle dimension à cette bataille en France et
en Europe.