Trop lourde et peu rémunérée, la fonction de directeur d'école souffre de désaffection

Le Monde - 08.09.01

Des négociations ont débuté, vendredi 7 septembre, entre les syndicats de l'enseignement élémentaire et l'éducation nationale sur le statut des directeurs d'école. Ces derniers réclament une amélioration des "décharges horaires", qui allègent leur emploi du temps dans les classes pour compenser leur surcroît de travail. Lourde et peu rémunérée, la fonction de direction souffre de désaffection : plus de 4 500 postes sont vacants.

C'est probablement l'un des dossiers les plus délicats à traiter pour le ministère de l'éducation nationale. Et, paradoxalement, malgré sa persistance, un des conflits les moins visibles du secteur éducatif. Depuis plus d'un an, une large majorité des 55 000 directeurs d'écoles maternelles et élémentaires suivent un mot d'ordre de "grève administrative", qui perturbe le travail de l'administration, mais reste sans effet sur le fonctionnement quotidien des écoles. Obligés d'assumer des responsabilités de direction souvent lourdes, tout en continuant à enseigner, ils exigent une amélioration significative de leurs conditions de travail.

Des négociations ont commencé, vendredi 7 septembre, entre les principaux syndicats d'enseignants (SGEN-CFDT, SNUipp-FSU, SE-UNSA, FO) et le ministère. Celui-ci devra répondre à la pression immédiate des organisations syndicales. Il devra, plus fondamentalement, tenter de pallier la désaffection pour la fonction de direction. Entre 4 500 à 4 800 postes, selon les estimations, sont aujourd'hui vacants, c'est-à-dire pourvus "en intérim" par des directeurs non titulaires. Des charges de travail importantes, le poids des responsabilités pénales et la faiblesse des indemnités expliquent cette désaffection.

En ouvrant les discussions, Christian Forestier, directeur de cabinet de Jack Lang, a confirmé les propositions déjà transmises aux syndicats en juillet. Celles-ci portent avant tout sur la question des "décharges horaires"attribuées aux directeurs pour compenser le surcroît de travail. Des décharges déterminées en fonction de la taille des écoles : une décharge complète lorsque celle-ci comporte 13 classes au moins, une demi-décharge pour les écoles de 10 à 13 classes, un quart de décharge pour celles qui comportent 6 à 9 classes. Les écoles de 5 classes se sont progressivement vu attribuer des décharges équivalentes. La moitié d'entre elles en bénéficient aujourd'hui. Toute la difficulté du dossier réside dans l'opposition entre les syndicats et le ministère sur le principe d'une généralisation de ces décharges à l'ensemble des directeurs. Les premiers y voient une condition pour répondre à la désaffection de la fonction. Le second en retient le surcoût financier, toute décharge se traduisant par une création de postes d'enseignants.

UN POSTE DE COORDONNATEUR
Sous la pression, cependant, la position du ministère a évolué. Reprenant une promesse faite en 1996, il s'est engagé à accorder, d'ici à trois ans, une décharge pour les écoles de 5 classes qui n'en bénéficient pas encore. Surtout, afin d'aider les directeurs des petites structures (moins de 4 classes), le ministère a proposé de créer des réseaux d'écoles dotées d'un poste de coordonnateur ayant vocation à assister les directeurs. Une revalorisation des indemnités compléterait le dispositif. Ces propositions seront-elles suffisantes ? Dans un contexte préélectoral, les syndicats comptent maintenir la pression. "Le ministère, et plus largement le gouvernement, doit réfléchir aux conséquences politiques s'il ne traite pas ce dossier", avertit le Syndicat des enseignants (SE-UNSA), en référence au poids politique des 55 000 directeurs. "Ces propositions sont insuffisantes", estime le SNUipp, principal syndicat du premier degré. "Des avancées, une écoute mais l'essentiel reste à faire", note le SGEN. Les discussions doivent reprendre le 13 septembre.

Luc Bronner